En principe, un dirigeant ne peut pas racheter les actifs ou l’activité de son entreprise en liquidation judiciaire.
Seuls les tiers à l’entreprise en difficulté ont le droit de faire une offre de reprise.
Le rachat des actifs isolés en liquidation judiciaire est régi par les articles L. 642-18 (pour les immeubles) et L. 642-19 (pour les actifs mobiliers) du code de commerce.
Le rachat de l’activité d’une entreprise en liquidation judiciaire est un « plan de cession » régi par les articles L. 642-1 et s. du code de commerce. Il s’agit de la cession d’une activité susceptible d’une exploitation autonome. Le plan de cession emporte la cession des actifs, des contrats et la reprise de salariés de l’entreprise en liquidation judiciaire.
Le principe : interdiction pour le dirigeant de se porter acquéreur, mais il y a des exceptions.
Par Luc Arminjon, avocat en droit des entreprises en difficulté : prévention des difficultés (mandat ad hoc et conciliation) reprise d’entreprises en redressement judiciaire ou liquidation judiciaire, redressement judiciaire, procédure de sauvegarde, liquidation judiciaire et défense des dirigeants (comblement de passif, faillite personnelle, interdiction de gérer).
Auteur du Guide du Repreneur
Le principe : interdiction pour le dirigeant racheter les actifs ou l’activité de son entreprise en liquidation judiciaire
L’offre de reprise doit émaner d’un tiers (article L. 642-3 du code de commerce).
Toute personne physique ou morale tierce à la procédure de liquidation judiciaire peut déposer une offre, à l’exclusion :
- de ses dirigeants ou par personne interposée (le dirigeant serait associé de la société qui se porte acquéreur).
- du débiteur lui-même
- de ses proches (jusqu’au 2e degré)
- de ses créanciers contrôleurs
- dérogation possible dans les entreprises agricoles (article L. 642-3 du Code de commerce).
Cette interdiction vise à éviter qu’un dirigeant dont l’entreprise « a fait faillite « ne puisse reprendre ses actifs sans apurer ses dettes.
Cette interdiction d’acquérir les actifs, directement ou indirectement, perdure pendant les cinq ans suivant la cession des actifs ou de l’activité à un tiers.
La sanction est la nullité de l’acte.
Il faut donc attendre cinq ans après la cession pour que les anciens dirigeants puissent être à nouveau actionnaire de la société qui a repris l’activité de leur ancienne entreprise.
En revanche, rien interdit au repreneur de conclure un contrat de travail avec l’ancien dirigeant de l’entreprise cédée. L’ancien dirigeant ne peut pas être actionnaire de la société qui a repris l’activité.
Les cas où le dirigeant peut racheter les actifs ou l’activité de son entreprise en liquidation judiciaire
Rachat de son entreprise en plan de cession par le dirigeant
En plan de cession, sur saisine du ministère public (article L. 642-3, al. 2 du code de commerce), le tribunal peut déroger aux interdictions de l’article L. 642-3 du code de commerce et autoriser, par un jugement spécialement motivé, la cession au profit d’un dirigeant ou d’un parent/allié, à l’exclusion des contrôleurs et du débiteur la saisine étant réservée au ministère public.
Aussi, si le tribunal n’est pas saisi d’une telle demande par le procureur de la République, la cession de l’entreprise en liquidation judiciaire au profit du dirigeant n’est pas possible. Le liquidateur ne peut pas saisir le tribunal à cette fin. Le tribunal ne pourrait pas statuer sur une offre de reprise déposée par le dirigeant s’il n’a pas été préalablement saisi par le procureur de la République « détaché » auprès du tribunal de commerce ou du tribunal des activités économiques.
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Rachat d’actifs isolés par le dirigeant
Le principe : il faut une requête préalable du ministère publique
En cession isolée d’actifs en liquidation, le juge-commissaire peut, par dérogation, autoriser la cession au profit du dirigeant, sur requête initiale nécessaire du ministère public et par décision spécialement motivée ( article L. 642-20 al. 1 du code de commerce). Cela concerne les actifs mobiliers et immobiliers.
L’exception : le juge commissaire peut donner son autorisation pour les actifs mobiliers
Pour les actifs mobiliers corporels et incorporels, le juge-commissaire peut autoriser la cession d’actifs isolés au dirigeant (article L. 642-20 al. 2 et 3) du code de commerce. Il doit respecter la procédure suivante.
La vente des actifs mobiliers doit se faire par une vente aux enchères publiques ou par adjudication amiable. La requête de dérogation à l’interdiction d’acquérir les biens mobiliers peut émaner du liquidateur ou du débiteur (et non nécessairement du ministère public), mais le juge-commissaire doit alors recueillir l’avis du ministère public et rendre une ordonnance spécialement motivée.
La dérogation reste exclue pour le débiteur et les contrôleurs (art. L. 642-20, al. 2 et 3 et R. 642-39 du code de commerce).
Cette possibilité de dispense de requête préalable du ministère public pour actifs mobiliers plus conséquents que des actifs d’une faible valeur est discutée en doctrine. Il faut donc valider la procédure à suivre au préalable avec le liquidateur avant de déposer son offre pour éviter une irrecevabilité de l’offre ou la nullité de la cession.
Cas particulier de l’ancien dirigeant et de l’associé ou actionnaire de l’entreprise en liquidation judiciaire
La Cour de cassation a jugé qu’il ne résulte pas de l’article L. 642-3 que l’ancien dirigeant de droit de la personne morale serait frappé d’une interdiction de présenter une offre de reprise, sauf fraude ou maintien en qualité de dirigeant de fait, ce que rappelle la doctrine récente (Com. 23 sept. 2014, n° 13-19.713).
L’ancien dirigeant est celui qui n’était plus dirigeant de l’entreprise au jour du jugement d’ouverture.
En pratique, si l’ancien dirigeant est demeuré dirigeant de fait ou s’il y a fraude ou interposition, l’offre demeure prohibée et encourt la nullité.
Le même raisonnement s’applique aux associés. Un associé qui n’a pas été dirigeant de droit ou de fait peut se porter acquéreur.
FAQ
Peut-on racheter son entreprise après une liquidation judiciaire ?
Non, sauf dérogation accordée par le tribunal sur saisine du ministère public.
Un dirigeant peut-il racheter un actif isolé en liquidation judiciaire ?
Oui, uniquement après autorisation du juge-commissaire, sur requête ou après avis du ministère public.
Un ancien dirigeant peut-il déposer une offre ?
Oui, tant qu’il n’était plus dirigeant au jour du jugement d’ouverture et qu’il n’existe ni fraude ni interposition.
Le dirigeant peut-il redevenir actionnaire ?
Oui, mais seulement après 5 ans suivant la cession.
À propos
Luc Arminjon, avocat en droit des entreprises en difficulté : prévention des difficultés (mandat ad hoc et conciliation) reprise d’entreprises en redressement judiciaire ou liquidation judiciaire, redressement judiciaire, procédure de sauvegarde, liquidation judiciaire et défense des dirigeants.
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