Lorsqu’une entreprise rencontre des difficultés financières, économiques, commerciales ou juridiques, elle peut recourir au mandat ad hoc, un dispositif de prévention prévu par l’article L. 611‑3 du code de commerce.

Cette procédure, confidentielle et sur mesure, permet au dirigeant de rester pleinement maître de la gestion de son entreprise tout en bénéficiant de l’aide d’un mandataire ad hoc, professionnel spécialisé (souvent un administrateur judiciaire) chargé de faciliter la recherche d’un accord amiable avec les principaux partenaires et créanciers.

Par Luc Arminjon, avocat en droit des entreprises en difficulté : prévention des difficultés (mandat ad hoc et conciliation) reprise d’entreprises en redressement judiciaire ou liquidation judiciaire, redressement judiciaire, procédure de sauvegarde, liquidation judiciaire et défense des dirigeants.

Le mandat ad hoc est un outil souple et préventif

Le mandat ad hoc peut être utilisé à tout moment, dès l’apparition de tensions ou de difficultés financières, sans attendre l’état de cessation des paiements.
Il offre une souplesse maximale :

  • il ne comporte pas de durée légale limitée (contrairement à la conciliation),
  • sa mission est définie librement par le président du tribunal selon les besoins du dirigeant, notamment la négociation avec les créanciers et partenaires de l’entreprise,
  • et il peut servir à préparer une conciliation ou une cession d’entreprise (“prepack cession”) dans une procédure ultérieure de sauvegarde ou de redressement judiciaire,
  • Le régime de confidentialité est particulièrement fort, y compris vis-à-vis du CSE et des tiers : le mandat ad hoc se déroule dans un cadre strictement confidentiel, préservant la réputation de l’entreprise.

La mission du mandataire ad hoc est une mission sur‑mesure fixée par le président du tribunal de commerce.

En mandat ad hoc, il n’y a pas de suspension automatique des poursuites de la part des créanciers.

Le régime de confidentialité est puissant, y compris vis‑à‑vis du CSE et des tiers.

Qu’est-ce qu’un mandat ad hoc ?

Dépôt d’une requête au greffe d’une demande de mandat ad hoc

Le dirigeant de l’entreprise en difficulté saisit le président du tribunal par une requête signée qu’il dépose ou par la voie de son avocat au greffe du tribunal.

Le débiteur peut proposer lui-même un nom de mandataire ad hoc au président du tribunal. En pratique, un échange préalable aura lieu entre l’entreprise en difficulté et le mandataire ad hoc pour définir sa mission et ses conditions de rémunération qui sont jointes à la requête.

Une fois la requête déposé, le président du tribunal convoque le dirigeant pour un entretien confidentiel afin de statuer sur la requête.

Le président accepte ou refuse la nomination du mandataire ad hoc. En cas de refus, le débiteur peut interjeter appel.

Le président du tribunal fixe la durée de la mission du mandataire ad hoc. Elle renouvelable, la loi ne comporte pas de limitation de durée à l’inverse de la conciliation. Elle est souvent d’une durée initiale de trois mois.

Toutes nouvelles requêtes (prorogation de mission etc.) doivent être formulées par le dirigeant de l’entreprise (le représentant légal) avec l’accord écrit du mandataire ad hoc.

Que contient la requête pour une demande de désignation d’un mandataire ad hoc ?

Contenu de la requête pour la désignation d’un mandataire ad hoc

La demande adressée au président du tribunal de doit exposer de manière claire :

  • les difficultés rencontrées par l’entreprise — qu’elles soient économiques, financières, sociales ou patrimoniales, les éventuels besoins de financement — qui justifient le recours au mandat ad hoc ;
  • les mesures de redressement envisagées : par exemple, un rééchelonnement des dettes, des remises partielles ou la recherche de nouveaux financements ;
  • le nom et les coordonnées du mandataire ad hoc proposé, si le dirigeant souhaite suggérer une personne au tribunal ;
  • le cas échéant, la date de cessation des paiements, si elle est connue (depuis moins de 45 jours avec le cas échéant une attestation de l’expert-comptable). L’entreprise peut être en état de cessation des paiements lors de la demande de mandat ad hoc. La loi n’exige pas une absence de cessation des paiements. Néanmoins, le débiteur doit procéder à une déclaration de cessation des paiements auprès du greffe du tribunal dans les 45 jours. Pour éviter cela, le mandataire ad hoc peut demander des moratoires aux créanciers.

Pièces à joindre à la requête

Le dossier doit comporter (en un seul exemplaire) :

  • un extrait K-bis récent (moins de trois mois) ou, à défaut un extrait du RNE ;
  • un état détaillé des créances et dettes, accompagné d’un échéancier et de la liste des principaux créanciers ;
  • un état des sûretés (actif et passif) et des engagements hors bilan ;
  • les comptes annuels et le tableau de financement des trois derniers exercices, ainsi qu’une situation de l’actif réalisable et disponible et du passif exigible, si ces documents ont été établis.

Pièces complémentaires conseillées

Le dépôt peut utilement être complété par :

  • une situation de trésorerie actuelle et prévisionnelle, ainsi qu’un compte d’exploitation prévisionnel ;
  • un état des cessions d’actifs intervenues au cours des 18 derniers mois ;
  • un état des inscriptions de privilèges (URSSAF, Trésor Public etc.) délivré par le greffe à la date de la requête ;
  • et, si un mandataire ad hoc est proposé, la convention d’honoraires correspondante précisant
    • la rémunération prévue (taux horaire, montant maximal, modalités de versement des provisions) ;
    • en rappelant que cette rémunération ne peut être calculée en fonction du montant des abandons de créances obtenus, ni faire l’objet d’un forfait pour l’ouverture du dossier.

Exemples de cas de demandes de mandat ad hoc

La désignation du mandataire ad hoc n’est pas subordonnée à l’impossibilité du fonctionnement normal de l’entreprise. L’existence de difficultés suffit.

Une entreprise peut solliciter la désignation d’un mandataire ad hoc dans de nombreuses situations, notamment lorsqu’elle rencontre :

  • des retards de paiement récurrents vis-à-vis de ses fournisseurs, nécessitant un étalement des dettes ;
  • la multiplication des inscriptions de privilèges par les organismes sociaux ou fiscaux ;
  • des difficultés à honorer les échéances d’emprunt, ou des remboursements devenus trop lourds au regard de sa trésorerie ;
  • la résiliation ou dénonciation de contrats fournisseurs menaçant la continuité de l’activité ;
  • préparation confidentielle d’une cession d’entreprise « prepack cession » (article L. 642-1 et s du code de commerce) dans une procédure collective ;
  • difficulté entre un franchiseur et ses franchisés sur une clause de non-concurrence ;
  • des conflits entre associés susceptibles de paralyser la gouvernance ou la prise de décision ;
  • la dénonciation de concours bancaires ou de lignes de crédit par un établissement financier ;
  • la dénonciation d’un bail commercial essentiel à l’activité par le bailleur ;
  • ou encore une assignation en justice par un créancier ou un fournisseur.

Confidentialité du mandat ad hoc

La procédure de mandat ad hoc est confidentielle (article L. 611-15 du code de commerce).

Toute personne appelée à la procédure ou qui en a connaissance par ses fonctions est tenue au secret, y compris vis‑à‑vis des tiers et entre les parties elles‑mêmes.

Le CSE n’a pas être informé. Seul le commissaire aux comptes, quand il en existe un, est informé par le tribunal de la désignation d’un mandataire ad hoc.

Absence de suspension des poursuites en mandat ad hoc

L’ouverture de la procédure de mandat ad hoc n’emporte pas la suspension des poursuites de la part des créanciers.

Mais l’entreprise en difficulté peut demander au juge d’accorder des délais de paiement en application de l’article 1343-5 du code civil.

Fin du mandat ad hoc

La mission du mandataire ad hoc prend fin dans plusieurs cas :

  • à la demande de l’entreprise
  • à la demande du mandataire ad hoc
  • à l’achèvement de la mission du mandataire ad hoc : signature d’un protocole, passage dans une procédure de conciliation ou d’une procédure collective, échec de la mission ou non renouvellement de sa mission par le président du tribunal à l’échéance d’une période.

L’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire met fin à l’accord négocié sous l’égide du mandataire ad hoc.

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Maître Luc Arminjon – Avocat en droit des entreprises en difficulté : reprise d’entreprises, redressement judiciaire, sauvegarde, liquidation judiciaire, mandat ad hoc, conciliation, défense des dirigeants.

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