Les chiffres des entreprises en difficulté au premier semestre 2025 sont mauvais. La situation économique se détériore pour les PME, notamment celles que l’on croyait à l’abri.

Aussi, quelles solutions les dirigeants de PME peuvent-ils mettre en place pour éviter le dépôt de bilan ?

La prévention des difficultés des entreprises offre deux solutions phares : le mandat ad hoc et la conciliation. Le code de commerce encadre ces deux procédures. Ils protègent les intérêts de l’ensemble des parties prenantes sous l’égide du tribunal en toute confidentialité. Alors pourquoi ne pas y recourir ?

Une crise qui s’installe dans la durée : défaillances d’entreprises à un niveau historiquement élevé

Des chiffres alarmants, mais une fausse stabilité

Un article paru dans l’édition du journal Les Échos le 8 juillet 2025 révèle l’état inquiétant de la situation économique des PME françaises. Cet article relate une étude d’Altares sur les défaillances d’entreprises au premier semestre 2025.

Le nombre d’ouvertures de procédures collectives en France s’élève à 34.106 pour le seul premier semestre 2025, en hausse de +0,4 % par rapport à 2024, mais +24,5 % par rapport à 2019.

Cela confirme une stabilisation à un niveau record. Pour mémoire, l’année 2024 avait déjà enregistré 66.000 défaillances d’entreprises, en hausse de 17 % sur un an.

Le second semestre 2025 s’annonce dans la même tendance, sans signe de décrue. Les administrateurs et mandataires judiciaires, en première ligne, évoquent une crise installée, profonde, avec peu de signaux de retournement à court terme.

Les PME et ETI de plus en plus touchées : un basculement préoccupant

Une structure du tissu économique fragilisée

Traditionnellement, 94 % des défaillances concernaient les TPE de moins de 10 salariés. Ce n’est plus le cas. On observe une montée inquiétante des procédures collectives affectant :

  • Des PME de 150 à 200 salariés,
  • Et surtout des entreprises de plus de 100 salariés, au nombre de 109 en redressement ou liquidation au premier semestre 2025, contre 84 l’an dernier (+30 %),
  • Impactant 26.600 salariés, contre 15.600 en 2024 (+71 %).

Les entreprises concernées sont souvent très endettées, avec peu ou plus d’accès au financement. Les établissements bancaires et les fonds se montrent beaucoup plus frileux.

Tous les secteurs sont concernés… ou presque

Une généralisation de la crise sectorielle

  • Industrie manufacturière : +10,9 % de défaillances sur un an.
  • Construction, commerce, restauration : toujours fortement touchés.
  • Services, taxis, informatique : désormais également fragilisés.
  • Immobilier : léger répit (-10 % de défaillances).
  • Économie sociale et solidaire (ESS) : entrée dans la zone rouge, avec une hausse des défaillances d’associations (14 % de l’emploi privé).

Seuls l’aéronautique et la défense, portés par les politiques de réarmement, semblent à l’abri pour l’instant.

Les causes profondes : une combinaison de facteurs cumulatifs

Une baisse d’activité mal anticipée

Les entreprises souffrent avant tout d’une chute de leur chiffre d’affaires, qu’elles ne parviennent pas à compenser par une baisse rapide des charges. Elles basculent ainsi rapidement dans le rouge.

Elles consomment leur trésorerie ou s’endettent, souvent à des taux élevés (3 à 4 %), ce qui accélère leur fragilité. La course au cash devient un facteur de risque majeur.

Le poids relatif mais réel des PGE

Les prêts garantis par l’État (PGE) ne sont pas la cause unique des défaillances, mais constituent un facteur aggravant :

  • La dette doit être remboursée avant fin 2026.
  • Elle représente en moyenne 6 % de la marge à restituer par an.
  • Le coût du refinancement est désormais plus élevé (autour de 3,5 %, contre 1 à 2 % durant la crise sanitaire).

Néanmoins, le taux de défaut des PGE reste modéré (5 % environ).

Des réponses judiciaires sous tension

Prévention : un recours en forte augmentation

Les procédures préventives de mandat ad hoc et de conciliation sont de plus en plus sollicitées, y compris par des structures de taille importante :

  • Certaines juridictions reçoivent désormais des entreprises de plus de 500 salariés.
  • À Bordeaux, le nombre de procédures amiables pourrait atteindre 300 en 2025, contre 230 en 2024.

Cette dynamique traduit une recherche active de solutions confidentielles et anticipées pour restructurer les dettes ou réorganiser l’activité.

Une montée en puissance dans les entreprises de taille importante

Selon les remontées des tribunaux de commerce, de plus en plus de grandes PME et ETI se tournent vers la prévention. En 2025, certaines juridictions comme celle de Bordeaux traitent plus de 300 procédures amiables, et les juges consulaires reçoivent des entreprises de plus de 500 salariés en mandat ad hoc ou en conciliation.

Le recours massif aux PGE, la hausse des taux, l’instabilité fiscale et la désaffection des fonds d’investissement rendent l’accès aux financements de plus en plus difficile. Les entreprises cherchent donc à négocier un cadre sécurisé, avec la bienveillance des juridictions économiques.

Quelles solutions pour les entreprises pour éviter le dépôt de bilan ?

Prévenir avant la chute : mandat ad hoc et conciliation, deux leviers clés pour anticiper la crise

Dans une période où l’activité se tend dans tous les secteurs, agir en amont est souvent le seul moyen d’éviter un effet domino fatal. Trop souvent, les entreprises attendent d’être en cessation de paiements pour bouger. Pourtant, le droit français offre des outils puissants de prévention, confidentiels et sur mesure : le mandat ad hoc et la conciliation.

Mandat ad hoc : une négociation confidentielle sans contrainte

Le mandat ad hoc permet à une entreprise de désigner, par simple requête auprès du président du tribunal de commerce (ou judiciaire), un mandataire ad hoc, généralement un administrateur judiciaire expérimenté. Sa mission est définie avec souplesse, en accord avec le dirigeant (article L.611-3 du code de commerce).

L’entreprise peut être en état de cessation des paiements lors de la demande de mandat ad hoc. La loi n’exige pas une absence de cessation des paiements.

Néanmoins, le débiteur doit procéder à une déclaration de cessation des paiements auprès du greffe du tribunal dans les 45 jours.

En pratique, il peut arriver que les créanciers , à la suite de la nomination du mandataire ad hoc, donnent un moratoire au débiteur sur l’exigibilité de leurs dettes. Aussi, le débiteur peut se trouver, au moins temporairement, en dehors de l’état de cessation des paiements.

Ce dispositif convient notamment :

  • en cas de tensions de trésorerie ponctuelles,
  • pour renégocier des dettes bancaires ou fournisseurs,
  • pour résoudre un conflit d’associés ou sortir d’un contentieux bloquant,
  • ou encore pour préparer une restructuration, notamment un plan de sauvegarde.

Avantages du mandat ad hoc :

  • Procédure totalement confidentielle ;
  • Aucun formalisme contraignant ;
  • Grande souplesse dans les objectifs fixés ;
  • Le chef d’entreprise reste totalement maître de la gestion.

Cependant, le mandat ad hoc ne permet pas d’homologuer un accord ni de conférer à celui-ci des effets juridiques renforcés. Il s’agit d’un outil de dialogue, efficace si les créanciers sont ouverts à la discussion.

Un accord négocié sous mandat ad hoc aura la valeur juridique d’un contrat classique.

Conciliation : la négociation encadrée, avec option de force juridique

La conciliation, régie par les articles L.611-4 à L.611-16 du code de commerce, constitue l’outil préventif le plus complet.

Elle s’adresse aux entreprises qui éprouvent des difficultés juridiques, économiques ou financières, sans être en cessation de paiements depuis plus de 45 jours.

 Sur requête du dirigeant, le président du tribunal désigne un conciliateur, généralement un administrateur judiciaire, qui dispose d’un mandat de 4 mois (prolongeable à 5 à la demande du conciliateur) pour aider l’entreprise à trouver un accord amiable avec ses partenaires (banques, bailleurs, fournisseurs, organismes sociaux et fiscaux…).

Les deux voies de sortie de la conciliation : accord constaté ou homologué

À l’issue de la négociation, deux options s’offrent au débiteur.

L’accord simplement constaté

  • L’accord amiable est constaté par le président du tribunal,
  • Confidentiel, aucune publicité
  • Donne une force exécutoire

Idéal pour les entreprises souhaitant une discrétion totale sans besoin de protection renforcée.

L’homologation de l’accord par le Tribunal

L’homologation est possible si l’entreprise n’est pas en cessation de paiements et l’accord permet d’assurer la pérennité de l’activité. Elleoffre des avantages substantiels.

L’accord ne doit pas porter atteinte aux intérêts des créanciers non-signataires. Dans certaines hypothèses, le président du tribunal peut accorder des délais de grâce au débiteur face à un créancier non-signataire (article L611-10-1 du code de commerce).

  • Effet de force exécutoire (article L.611-8 C. com.) :
    L’accord homologué est un véritable titre exécutoire. Il peut être directement utilisé pour contraindre un créancier récalcitrant à exécuter ses engagements.
  • Suspension des poursuites individuelles (article L.611-10) :
    Les créanciers signataires ne peuvent plus engager d’action en justice ou de mesures conservatoires, sous peine de nullité.
  • Mention au BODACC :
    La décision est publiée au BODACC, ce qui peut rassurer les partenaires, notamment les fournisseurs ou les investisseurs, sur la nature encadrée du redressement. Mais le contenu de l’accord reste confidentiel.
  • Information du CSE
  • Privilège de conciliation (“new money”) (article L.611-11 C. com.) :
    Les apports en trésorerie, crédits ou avances consentis à l’entreprise dans le cadre de l’accord homologué bénéficient d’un privilège de paiement en cas de procédure collective ultérieure.
    Cela signifie que les nouveaux financements seront prioritaires dans la répartition de l’actif, devant de nombreux autres créanciers.  Un argument-clé pour convaincre les banques ou investisseurs de soutenir une entreprise en difficulté.

Conclusion : sécuriser l’entreprise sans les inconvénients d’une procédure collective

La prévention des difficultés n’est pas un aveu d’échec, mais une démarche responsable, stratégique et protectrice. Elle permet de garder la main, de rassurer les partenaires et, dans certains cas, de bénéficier d’un cadre judiciaire protecteur sans perte de contrôle.

Pour les dirigeants, elle constitue une réelle opportunité de rebond, à condition d’être engagée assez tôt et accompagnée par un professionnel expérimenté.

Réforme en cours : quelle simplification du droit des entreprises en difficulté ?

Le gouvernement a lancé un groupe de travail de 18 mois visant à :

  • Créer un régime simplifié pour les entreprises de moins de 10 salariés,
  • Fusionner mandat ad hoc et conciliation,
  • Fusionner sauvegarde et redressement judiciaire.

Les praticiens (administrateurs judiciaires, juges consulaires) se montrent circonspects, craignant une perte de souplesse :

« N’enfermons pas les procédures dans des carcans. L’objectif est de sauver les entreprises et les emplois. »

En conclusion

La situation actuelle est marquée par une hausse qualitative des défaillances : moins de petits incidents isolés, davantage de crises profondes touchant le cœur même du tissu économique — les PME et ETI.

Lexique

« Entreprise en difficulté » ou « débiteur » désignent indifféremment la personne morale ou la personne physique qui fait l’objet d’une procédure collective ou d’une procédure de prévention des difficultés des entreprises : Mandat ad hoc ou Conciliation.  

« Procédure collective » désigne soit une procédure de sauvegarde, soit une procédure de redressement judiciaire, soit une procédure de liquidation judiciaire. La procédure collective d’une entreprise est ouverte par un jugement du tribunal appelé jugement d’ouverture. Quand cela sera nécessaire, la procédure collective en question sera précisée. 

« Dépôt de bilan » est devenue une expression du langage courant qui désigne l’acte par lequel le chef d’entreprise demande au tribunal d’ouvrir une procédure collective au bénéfice de son entreprise. Dans le cas d’une demande de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, le chef d’entreprise procèdera à une déclaration de cessation des paiements. 

En tant qu’avocat en droit des entreprises en difficulté, j’accompagne les dirigeants à chaque étape de ce parcours exigeant mais salvateur : du diagnostic initial jusqu’à l’exécution du plan. 

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Maître Luc Arminjon – Avocat en droit des entreprises en difficulté  (mandat ad hoc, conciliation, sauvegarde, redressement judiciaire et liquidation judiciaire).

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